Arrivée royale inattendue à Champerolles

La reine regardait son époux depuis un petit moment maintenant. Le roi avait toujours aimé la botanique et le jardin en général, d’ailleurs après l’occupation locquetienne, qui avait laissé ravagé le Palais-Sacré, la première chose dont le roi commanda les nouveaux plans fut les jardins royaux. Il avait mis son grain de sel, souhaitant agrandir le Palais-Sacré pour laisser plus de place aux jardins, il n’avait pas hésité à tailler dans la ville pour que l’enceinte forme un carré parfait. Grand ordonnateur, maniaque à ses heures, le roi oubliait de parler à sa femme lorsqu’il était contrarié.

C’était ainsi que la reine voyait son mari. Le roi étant trop occupé pour avoir remarqué sa présence, elle le surprit alors qu’il s’apprêtait à tailler une rose :

- Cette rose Autricum est magnifique, tu ne devrais pas Vincent.

Le roi sursauta presque en entendant la voix de la reine juste derrière lui.

— Ah ?! tu crois ?! mais c’est-à-dire que je voulais te l’offrir ma chère, mais, puisque tu ne veux point que je la coupe, elle restera où elle est. Je n’y toucherais pas. Allons, marchons un peu veux-tu ?

Ils partirent en direction des bosquets, et le roi alla droit au but.

— J’ai appris de façon très désagréable par ma sœur, la duchesse d’Hernani, que tu n’étais pas favorable au mariage de notre fils avec la princesse Maria-Aurélia de Temararien. La dernière fois que nous en avions palé, tu ne m’avais pourtant pas semblé si opposé que cela à cette union. En apprenant la détresse dans laquelle u te trouvais, j’ai préféré couper court à tout ceci et t’amener ici. Je sais ce que Champerolles représente pour toi, et c’est toujours un réel plaisir que de revoir ces pierres qui portent en elles les secrets de notre première rencontre.

Le roi, qui souhaitait attendrir son épouse pour la faire parler, attendit maintenant sa réponse avec impatience.

La reine n’était pas idiote, elle savait pourquoi son époux avait choisi Champerolles. Elle était même un peu fâchée que parmi toutes les résidences royales, il ait choisi celle-ci en particulier. Elle n’aimait pas vraiment que le roi instrumentalise ses sentiments.

- Oui, je me souviens parfaitement de cette rencontre. Cependant, ce n’est pas pour te pencher sur des souvenirs que tu m’as fait venir ici, alors n’utilise donc pas comme mes sentiments. Le mariage de notre fils n’est pas seulement une affaire d’État, au risque de te déplaire, c’est aussi une affaire de cœur. Je ne m’oppose pas à ce mariage en particulier, mais à la méthode que tu emploies pour le conclure. Il semble que les Belondaures aient déteint sur toi mon ami.

Tu ne m’as pas même consulté pour cette affaire, et c’est ce qui me fait effectivement pleurer chaque soir depuis maintenant quelques mois. Je suis reine d’Aldarnor, en te donnant un héritier, j’ai fait mon seul devoir de reine : alors n’oublie pas tous les devoirs que tu as envers moi ! J’estime avoir le droit de prendre part aux discussions concernant le mariage de notre fils ! et si tu es le grand roi que je crois, alors peut-être me laisseras-tu aussi le privilège de donner une quelconque forme d’importance à mon opinion.

Ta chère sœur, comme tu le sais déjà, a un fâcheux don pour toujours déformer ce qu’on lui confie. Je ne suis pas contre un mariage avec une Belondaure, à la condition que le principal intéressé dans l’affaire soit d’accord. Tu vas former un couple, qui un jour sera à la tête de l’État, si jamais il est disharmonieux, alors tu mets en péril l’existence même de la monarchie. Il faut que Louis puisse compter sur sa femme, à défaut de l’aimer : il faut qu’elle soit une bonne reine.

La reine était d’un naturel direct. C’est ce qui avait charmé le roi, en partie. Elle n’était pas une Autricum, pas de pompe, ni de chichi pour la princesse d’une famille de fonctionnaires qui avait le prestige d’avoir donné sept empereurs dombains. Le père d’Audrey, le dernier empereur dombain, était un homme assez simple, plus patriarche de famille qu’empereur. La première fois qu’Audrey Bosir avait tutoyé celui qui n’était encore que le victorin d’Aldarnor, il était devenu tout rouge. Même la maîtresse d’alors de Vincent n’osait le tutoyer. Les Autricum étaient froids, solennels, mais ils étaient aussi des personnages généralement gentils.

Vincent II avait été séduit par cette jeune femme sans masque, qui n’arrivait pas à dissimuler son tempérament bouillonnant. Le roi sourit, il ravala sa salive, comme pour se donner du courage :

— Hey bien ma chère, c’est d’accord ! soit ! nous dirons que le mariage ne se fera pas si le victorin ne le veut pas – le roi pensa alors « il a intérêt à vouloir ! » –, j’avais peur que tu sois totalement opposée à ce mariage. Mais j’entends parfaitement ton argument. La princesse Amélie est la seule princesse syiste à marier, je ne peux décemment pas marier mon héritier à une païenne ! J’espère que ce mariage pourra se faire, je n’ai pas vraiment compris pourquoi Louis a changé d’avis en cour de route, je suppose qu’on lui a monté la tête…